Je me suis entretenu avec Olivier Novasque, PDG et Fondateur de Sidetrade. De cette rencontre de 45 minutes est né le présent article, présentant son entreprise florissante en détails. Il s’agit d’une exclusivité pour Moning !
(Olivier Novasque, PDG / Fondateur de Sidetrade)
Présentation de Sidetrade
Fondée en l’an 2000, Sidetrade est une micro-cap française (éligible PEA) dont le développement se fait à l’international. Elle est, au moment de l’écriture de ces lignes, valorisée approximativement 200 millions € et cotée sur Euronext Paris. Son chiffre d’affaires, en hausse constante chaque année, dépassera (assez largement) pour la première fois la barre des 40 millions €.
La société est spécialisée dans l’édition de logiciels « Order-to-Cash ». C’est à dire qu’elle couvre l’ensemble de la gestion de la commande client, de la prise de celle-ci, jusqu’à l’encaissement des fonds, en passant par la gestion des risques et d’éventuels litiges. Pour ce faire, Sidetrade propose aux grandes entreprises à travers le monde une solution logicielle basée sur l’IA, laquelle permet à ces derniers d’optimiser leurs propres processus de gestion, comme me l’a expliqué Olivier Novasque lors de notre récente rencontre.
L’intérêt pour le client étant alors de réduire les délais dans lesquels ses factures lui sont réglées, tout en gagnant en productivité via l’automatisation intelligente de tâches de gestion particulièrement complexes.
Aujourd’hui, Gartner, spécialiste mondialement reconnu dans le domaine du Conseil, positionne Sidetrade comme l’un des trois leaders mondiaux de son marché. Des analystes comme Oddo BHF estiment d’ailleurs que la société est idéalement positionnée afin de « pénétrer et gagner la bataille sur le haut du marché » (entreprises clientes de plus de 10.000 salariés). En outre, ce même analyste considère Sidetrade comme disposant d’un « niveau de maturité élevé ».
Une approche clé dans un contexte économique compliqué
La gestion du cash est un élément primordial pour n’importe quelle entreprise, d’autant plus dans un contexte économique particulièrement incertain comme nous le connaissons actuellement.
« Du fait de la hausse des taux d’intérêts et des difficultés -pour beaucoup d’entreprises- à pouvoir emprunter à des taux raisonnables, il vaut mieux avoir 10 millions € sur le compte bancaire de sa propre société plutôt qu’en retard de paiement sur le compte du client. »
Comme le fait remarquer Olivier Novasque, la fin des aides gouvernementales post-Covid dans de nombreux pays dans le monde entraîne une hausse importante des risques de faillites des acteurs les plus fragiles. Ce qui nécessite, dès lors, d’être en mesure d’anticiper ces risques de crédit le plus tôt possible afin de les intégrer à part entière et de pouvoir agir en conséquence tout au long de la relation d’affaires.
Afin de pouvoir se positionner de façon optimale sur ce segment de la gestion du « risque de crédit », Sidetrade a notamment réalisé une opération de croissance externe il y a quelques mois, en rachetant un spécialiste américain : CreditPoint Software.
L’'IA dans l’ensemble de ce processus
Sidetrade a développée sa propre IA, prénommée Aimie, afin d’accompagner ses clients. Ceci nécessite néanmoins de pouvoir proposer des approches commerciales adaptées à chaque situation et susceptibles d’évoluer à tout instant de la relation d’affaires. Il est donc impératif de disposer d’une base de données conséquente et complète !
« Nous avons besoin d’un Data Set (un « jeu de données ») très important. […] Sidetrade dispose aujourd’hui d’un Data Lake (un « lac de données », à savoir, une méthode de stockage des données massives) représentant plus 550 millions d’expériences de paiements sur plus de 21 millions de débiteurs finaux. Le tout représentant -en valeur- un flux de plus de 5000 milliards $ sur les trois dernières années. »
Tout ceci permet ainsi, à l’aide d’algorithmes prédictifs, d’anticiper le moment auquel une entreprise va pouvoir régler ses factures. Une approche permettant donc de classer les clients selon les risques qu’ils font encourir au débiteur, mais aussi de proposer les meilleures actions de relance, en temps réel, à envisager afin de réduire les délais de paiements. Il est donc évident que l’IA joue un rôle prépondérant.
Les ambitions de Sidetrade
Alors que la société investi massivement, notamment aux États-Unis (près de 4 millions € sur le seul premier semestre 2023), les ambitions affichées sont claires et ne laissent que peu de place à l’interprétation…
« Notre ambition est de devenir l’acteur numéro 1 sur le new business aux États-Unis. Autrement dit, de parvenir à obtenir plus de 50% des parts de marché sur tous les nouveaux appels d’offres (sachant que Sidetrade se focalise sur les clients potentiels réalisant plus de 1 milliard $ de revenus). »
Ainsi, lorsque Sidetrade s’est lancée sur le marché américain (mi-2021), l’ambition affichée au niveau de sa propre activité commerciale était que les États-Unis représentent au moins 1/3 des prises de commandes du groupe au 4ème trimestre 2022. Finalement, les attentes auront été largement dépassées, puisqu’à cette échéance, ce nouveau marché regroupait déjà plus de 50% des commandes sur l’ensemble de l’année en question. Un succès plus rapide que prévu, faisant du Pays de l’Oncle Sam le véritable moteur de croissance du groupe.
Le fait est que les clients potentiels sont en nombre équivalent en Europe et aux États-Unis. Il ressort néanmoins que les sociétés américaines sont bien plus enclin à « acheter du logiciel et à s’équiper ». Elles sont « beaucoup plus mâtures sur la consommation en matière de technologie et de logiciel d’intelligence artificielle ».
Les ambitions de Sidetrade s’imprègnent également de l’état actuel du marché. En effet, seuls 10 à 20% des clients potentiels sont aujourd’hui équipés de solutions professionnelles de gestion de l’Order-to-Cash. Il s’agit donc, par définition, d’un marché encore très jeune et qui reste à conquérir dans sa quasi-totalité. Ce qui représente un élément clé, dans la mesure où il ne s’agit pas de prendre la place d’un concurrent qui serait déjà établi, mais bien d’être le premier à s’implanter.
Stratégie de développement
Sidetrade est parvenue à signer des entreprises américaines engrangeant plusieurs milliards $ de revenus chaque année. Parmi lesquelles HP Enterprise, DXC Technology ou encore Border States. Des contrats américains d’importance qui œuvrent, tels des créateurs de nouvelles opportunités, y compris sur d’autres marchés.
La présence aux États-Unis est un véritable « must have » pour convaincre des entreprises du monde entier telles que Bayer, Dassault Systèmes, BIC, Critéo, dès lors qu’elles sont à la recherche d’un acteur global qui soit capable de les accompagner sur l’ensemble de leurs marchés respectifs.
En outre, la principale source de revenus de Sidetrade réside dans la vente d’abonnements à ses solutions logicielles d’Order-to-Cash. Des produits sur lesquels le groupe réalise une marge brute de l’ordre de 93%, permettant d’associer croissance rapide et rentabilité très importante.
Ceci d’autant plus que les clients s’engagent sur du long terme, potentiellement plusieurs décennies, avec des solutions logicielles complexes les rendant pour ainsi dire « captifs ». Comprenez ce terme dans le sens où changer de partenaire Order-to-Cash aurait un coût financier très important. D’une part du fait des montants déjà investis, et d’autre part pour toutes les nouveautés techniques (implémentation, formations, etc.) que cela engendrerait. Tout ces éléments offrent une importante garantie quant au taux de renouvellement des contrats, avec un taux de churn -taux de perte de clientèle- de l’ordre de seulement 5% par an, contre, généralement, 11 % pour le secteur Technologique.
La visibilité quant aux années futures est donc très grande, et permet à Sidetrade d’établir des plans de développement, mais également de profitabilité, sur du long terme. Ceci est d’autant plus vrai que la durée d’abonnement initiale est en moyenne de 44,8 mois… avec tacite reconduction à échéance !
Il est également intéressant de noter que l’entreprise a déjà trouvé son point d’équilibre entre la « vente d’abonnements » (environ 90% des revenus) et la « vente de services » (implémentation, formations, accompagnement des clients, pour environ 10% des revenus). Ce qui lui assure donc 90% de revenus récurrents au fil des ans… lesquels offrent 93% de marge brute. Le tout avec une clause -présente sur l’ensemble des contrats-, prévoyant une indexation annuelle sur l’inflation.
Situation financière
Sidetrade dispose, à l’issue du T3 2023, d’une trésorerie brute de l’ordre de 23 millions €, à laquelle s’ajoute environ 12 millions € d’actions auto-détenues. Se trouve en face une dette d’un montant inférieur à 11 millions €, laquelle a été contractée (en 2021) à un taux fixe de 1,1%. Ce qui fait ressortir grosso modo 12 millions € de trésorerie nette plus les actions auto-détenues.
Il s’agit là d’une force évidente pour l’entreprise, laquelle lui donne la possibilité de gérer au mieux les opportunités s’offrant à elle. Ainsi, elle a tout loisir d’investir dans sa croissance organique ainsi que dans de la croissance externe si une occasion se présente. D’autant plus qu’elle est déjà profitable.
« Nous resterons sur un niveau d’investissements qui nous permettra de garantir une certaine rentabilité ! Nous avons un modèle de croissance profitable. La prédictibilité de nos revenus nous permet de piloter notre rentabilité en fonction des investissements que nous voulons y mettre. »
En outre, la politique de croissance externe a vocation à perdurer (acquisitions de Amalto en 2021 et de CreditPoint Software en 2023), à partir du moment où les opportunités d’acquisitions sont relutives pour les actionnaires de Sidetrade. Croître uniquement dans le but de réaliser plus de revenus n’aurait aucun sens affirme Olivier Novasque. Qui plus est si la profitabilité de Sidetrade devait s’en trouver affectée et si il n’y avait pas d’intérêt stratégique évident.
Sidetrade, une taille critique ?
L’étude menée par ODDO BHF en avril 2023 estime que l’une des faiblesses de Sidetrade réside dans sa « taille ». En effet, sa valorisation oscille autour des 200 millions €, pour des revenus d’activités 2023 estimés à 44 millions € par le marché.
« Certes on est encore un peu petits, mais on avance très vite ! »
Dans un contexte où le principal concurrent (en terme de taille) ne réalise « que » 150 millions $ de revenus, Sidetrade ne fait pas, pour autant, figure de « Petit Poucet ». La croissance rapide de la société ainsi que sa stratégie de développement devraient pouvoir lui permettre, d’une part, de ne pas se laisser distancer par la concurrence, et, d’autre part, de pouvoir asseoir sa place parmi les leader du secteur. Ceci avec l’objectif de devenir, à terme, le numéro 1.
Le gros avantage de Sidetrade réside dans le fait que son marché est encore jeune. Ainsi, parmi l’ensemble des compétiteurs existant, aucun n’a encore réellement atteint une taille critique. Les contours du secteur se dessinent petit à petit et offrent donc suffisamment de place pour que plusieurs acteurs pourront se développer de façon simultané
Structure du capital et valorisation future
Olivier Novasque, PDG / Fondateur de Sidetrade, est aujourd’hui le premier actionnaire de la société, dont il détient 35%. Le management est intéressé à hauteur de 7% et 4,7% sont détenus en auto-contrôle. Ce qui laisse « seulement » 53,3% de capital flottant. Autrement dit, une prise de contrôle de Sidetrade à l’occasion d’une opération capitalistique est hautement improbable.
Tout souhait de faire « main basse » sur l’entreprise n’aurait donc que peu de chances réussir sans que Olivier Novasque n’apporte ses propres titres. C’est un vrai plus pour l’ensemble des actionnaires, qui peuvent donc avoir une vision sereine de l’avenir quant à la pérennité de Sidetrade.
« Je ne pense pas qu’à court terme ce soit une option ! Pour la simple raison que je pense qu’à court terme -3 ou 4 ans-, Sidetrade a tous les atouts pour valoir 1 milliard € de market cap. Ce serait donc idiot de ma part de vendre aujourd’hui sur une valorisation de 200 millions €, y compris avec un premium de 50%. »
Pour justifier ces 1 milliard € de valorisation, Oliver Novasque évoque la faible valorisation actuelle des entreprises SaaS aux États-Unis, lesquelles se situent à seulement 6 fois les revenus prévus pour les douze prochains mois. Sidetrade, elle, n’est valorisée de la sorte qu’à hauteur de 4 fois ses revenus futurs à douze mois. Il existe donc déjà , dans un marché plutôt déprimé, un potentiel de 50% rien que pour rattraper son « retard de valorisation » face à concurrence. En outre, un retour en grâce des valeurs proposant du SaaS serait évidemment de nature à faire croître de nouveau les multiples de valorisation.
En attendant, Olivier Novasque achète, personnellement et régulièrement, de nouveaux titres de Sidetrade sur le marché. Renforçant ainsi sa position d’actionnaire principal de la société.
Mon point de vue sur Sidetrade
Il s’agit d’une entreprise affichant une croissance très appréciable et offrant une visibilité que peu d’autres sont en mesure de garantir à leurs à leurs actionnaires. Mis à part le fait que ce soit une micro-cap (avec les risques propres à ce type de petites capitalisations), Sidetrade me semble être une entreprise disposant d’un potentiel fort intéressant pour les années à venir et mérite d’être étudiée pour quiconque souhaiterait intégrer une valeur de croissance à son portefeuille ! Ses services couvrent, en particulier en période de tensions économiques évidentes, des besoins vitaux pour toute entreprise : Se faire payer !
Disclaimer
Cette présentation détaillée de Sidetrade résulte de mon entretien avec Olivier Novasque, PDG / Fondateur de la société. Mon point de vue personnel sur l’entreprise (ainsi que la présentation qui en est faite) ne constituent en aucun cas un Conseil en Investissement.
Je suis moi-même, au moment de l’écriture de cette publication, actionnaire de Sidetrade à hauteur de dix-huit titres (valorisés environ 2,5k€). Je suis susceptible d’effectuer de nouveaux achats. Je n’ai aucunement l’intention de vendre mes titres.
Toute décision d’achat / vente ne doit se faire qu’après une analyse personnelle de la société. Il sera d’ailleurs important de suivre les publications régulières de l’entreprise, afin de s’assurer que son orientation opérationnelle / financière ne connaisse pas d’inflexion !